mardi 28 mars 2017

LES ONGLES...

Il fallait bien compter une bonne heure, un demi-litre de café ou les huit doigts de la gamme majeure pour mettre en route la machine. Il fallait consulter les pendules, les thermomètres, les baromètres, prendre les nouvelles du monde sur les écrans endormis,  et ouvrir l'horoscope du matin pour que tout se dérouille, se dégrince... Pour que la lumière se dégrise et vienne poser sa patte sur le coin de la table qu'il affectionnait. Là où il avait laissé les souvenirs de la veille. Le rituel du levé était digne d'un roi déchu, d'un souverain en exil... Pendant que les cafetières agitaient leurs bocaux entre deux volets disjoints, et que l'araignée du soir s'emmêlait dans sa toile,  il s'échinait sur la platine où tournait sans relâche un Homme à la Tête de Choux. Sans doute eût-il mieux valu une bonne dose de crazy-music pour déboucher ses trompes, mais aujourd'hui, ses oreilles se renfrognaient, demandaient pardon comme de vieilles bigotes prises en flag de pensées impures, de lui avoir fait endurer tant de stridences et de décibels. Le Vieil Age n'aspire plus qu'à un univers sans épines, qu'à la douce mélancolie qui ouvrent la route du tombeau, et le Beau Serge et sa futile Marilou suffisaient à combler les rainures du plancher. Demain  serait un autre jour pensait-il en mesurant ses ongles qui avaient poussé pendant la nuit...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

 H                                                                                                           U                              ...