jeudi 2 avril 2020

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Je ne sais pas si j'ai bien fait. Je l'ai prise par la main, et l'ai emmené sur le chemin de hallage, qui longe les restes de l'usines chimique qui a brûlé l'été dernier, dégueulant dans le canal un tas de saloperies que les grenouilles n'ont pas digéré... Les poiscailles non plus d'ailleurs, qui ont fini ventre à l'air sur les berges, là où d'habitude, les pêcheurs usaient leur popotin sur des strapontins inconforts... Elle est partie jouer entre les barils pourris, à la recherche d'un trésor, disait-elle, a grimpé sur la grue calcinée pour voir le monde... J'ai dû intervenir quand elle a voulu se lancer du haut de la plate-forme, pour apprendre à voler... Les enfants, c'est bien du souci, disait ma vieille mère... Toujours à ignorer le danger, à traverser hors des clous, et à rigoler parce qu'une mouche se pose sur le bord de leur nez... 
J'aurais voulu lui montrer quelques brins d'herbe, quelques fleurs sauvages, un envol de canards, lui faire entendre le chant d'un piaf, lui raconter l'histoire de Jonathan le Goéland, mais bernique et coups de trique... Impossible de trouver la moindre respiration dans ce poumon flétri...J'ai pensé à tous nos voisins, enfermés chez eux, rendus foldingues de solitude, prêts à mordre, si une fillette frappait à leur porte... Me suis demandé si on n'avait pas poussé le bouchon un peu loin... 
                                                                FIN.
Contes à rebours.
J / 17.

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