Gros Bill n'a jamais lu les "grands auteurs". Parfois, il le regrette. Pas longtemps. Il n'aurait jamais la patience d'arriver jusqu'au bout des tartines qui font l'orgueil des bibliothèques en peau de zébu. Que du relié au fil d'or, la fine fleur des lecteurs nécrophiles (?), des  des gars qui se grattent l'occiput, à méditer sur les malheurs de Lulu de Rubempré, sur Fabrice de la Chartreuse, ou sur la prose ampoulée de l'autre Tréamont... Même les sextapes du Marquis l'emmerdent, bien que les malheurs de Justine valent bien ceux des footeux millionnaires, ou des humoriste déjantés. Déjà qu'il a du mal avec les bouquins de supermarchés, les succès de librairie, les prix littéraires, et les romans de gare, il ne va pas s'embrouiller avec la syntaxe de tous ces furax... Marie Marie la pisseuse délurée, sortie tout droit des pages du Fredo salace, et rigolo,  lui a dit que les philosophes grecs, les penseurs chinois, les ruskoffs à rallonge, les chapeaux pointus mandchous (?) et J.P Sartre qu'elle peut pas piffer, c'est pas d'la tarte.  Qu'ils aillent se faire voir ! qu'elle a rajouté avec toute sa malice. Aux joyeuses années de l'enfance, avant d'être gros, Bill feuilletait volontiers les catalogues. La Redoute, Les Trois Suisses, la Bergère de France, et ses moutons, que sa mère lui prêtait pour qu'il lui foute la paix. C'est dans ces pages, entre deux vélos, et cinquante cartouches de chevrotine qu'il parcourait le monde Manufrance, découvrait des rondeurs inconnues entre deux réclames de lingeries fines, faisait ses premières armes dans les romans photos à l'eau de rose, qui promettaient un avenir ravageur. On était loin de Montaigne et la Boétie, de l'autre dans son tonneau, de la légitime d'Ulysse qui faisait tapisserie pire Marinette au bal des pompiers, des poètes ronchons et des pinailleurs de mots. Quand le gigolo chirurgien épousait la donzelle infirmière, y'avait rien à ajouter. C'était dans l'ordre des choses, et le Petit Billou se voyait déjà en haut de l'affiche.

Gros Bill.