Louis Trompette ouvre sa grande mouille. On voit toutes tes dents* et sa grosse voix de rocaille percute le mur du son. Le café est brûlant mais bon. Il faut tenir la tasse d'une main (la gauche) et rouler la clop de l'autre. Ce n'est pas une mince affaire... Faudrait être magicien, faire sortir le lapin du chapeau, un peu comme l'amour...  En attendant, le papier colle, les brins de tabac font ce qu'ils veulent.  Louis souffle un grand coup. Une envolée de bignou à faire fuir tous les corbeaux, qui se gavent de bestioles sur la pelouse enneigée. Un solo à faire tourner la tête, pire la première bouffée de goudron dans les éponges fatiguées.  Il vacille un peu. Mai Satchmo tient bon. Le bugle planté entre des joues plus rondes que celles de Dizzy il envoie des trilles qui rebondissent sur la baie vitrée saupoudrée de givre, et le matou qui croit entendre la sonnerie aux croquettes, lui fout la première trouille de la journée. Bientôt, la maison s'éveillera. Faudra surveiller les miochons autour de la piscine. Pleurotte n'a-t-'elle sauté pieds joints dans le bassin pensant qu'il y avait de l'eau ? En plein hiver, je vous le demande... Ranger les couteaux, les lames, les ciseaux, les allumettes. Ces bougres sont toujours à l'affût d'une connerie à faire. Louis rangera sa trompette, et il aura droit à une playliste à la noix.

*Armstrong.

 Claude Nougaro.