Moi, je suis resté... Je sais pas pourquoi... La peur du bandeau final ? Même pas... J'avais trop de macchabs en stock pour choper la trouille devant le peloton... Plutôt, la fatigue... Pas plus confiance dans l'avenir que ça... Mais fatalitas ! Et puis, j'avais des relents de gaz moutarde dans les narines, alors on m'avait fait quitter les premières lignes... " Un planqué " comme on disait alors... Planqué, c'est vite dit, j'avais les éponges qui charraient de la sciure de bois... Je m'occupais d'une cantine, un bourricot devant et vingt bidons derrière qui contenaient un frichti que les gaspard dédaignaient... Le hommes non... Les hommes quand tu les broies, ça ose tout...
En 17, pendant l'offensive du va-en-guerre Nivelle, je suis remonté au casse-pipe avec les Dames.et là, je peux te dire, on a dansé la carmagnole avec le diable... J'ai eu du bol... Le canasson et la charrette sont partis en confettis, et moi, je me suis retrouvé quinze mètres plus loin à compter mes abatis dans la bouse... Pour une fois que j'avais de la chance dans ma vie, j'allais sûr la pècho, comme vous dites aujourd'hui... C'est à ce moment qu'ont commencé les grande mutineries, celles qu'on cache dans les livres d'histoire des loupiots pour pas leur donner de mauvaises pensées...
Contes du Poilus
Editions Casse-Pipe.
Dessins Tardi.
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