samedi 11 février 2017

ATELIER ( 2 )

Je vous raconte mes histoires d'atelier parce que dernièrement j'ai vu un auteur à succès, adoubé par la critique*,  quelques dizaines de bouquins derrière lui, un fauteuil à la NRF - paraît que ça pose son homme - un pote à Bécherel,  un gars qui fait pas de fautes et manie la syntaxe comme personne, diriger un " Atelier d'écriture " devant des z'apprentis z'oteurs tous z'attentifs quand il rend les copies... Une vraie ménagerie de cours élémentaire... Z'inquiets ou z'heureux selon le verdict du Maestro... J'ai posé mon brouillon... Je savais que le Vieux Charles faisait des lectures, que le jeunot Easton Ellis donnait des cours de gribouillage pour payer sa coke... Les Amerlokes sont tellement branques que ça m'étonnait qu'à moitié... Mais chez nous... Les petits enfants de Blondin ou de Sana, la marmaille à Victor et du très Honoré... J'en ai laissé tomber mon godet... C'est ça la solution ! que je me suis dit en recrachant mes poumons... Trouver un type balaise qui vous explique comment tripatouiller dans les syllabes... Un plombier qui connaisse la robinetterie, qui sache déboucher le siphon (ainsi font font font...) pour laisser couler les mots, chauffer les tuyaux des virgules, raccorder les participes et souder ces foutus compléments sans objet... J'en avais les esgourdes toutes émoustillées... 
" Machin... C'est pas mal... Bien que les pages de radada n'apportent rien au texte... Ou alors,  si tu veux que ça danse dans les coursives, faire monter le thermo,  écris bite plutôt que membre turgescent, évite glandes mammaires ou poitrine protubérante... Nichons fluorescents, ça c'est de la musique !
- Encore fallut-il que je le susse Maître !
" C'est pour cela que je suis là, à jouer du chalumeau, de la pince multi pour vos crânes de piafs.. Relisez Brautigane, Carver ou Fante bon dieu !
Finalement, j'ai trouvé sympa tous ces " élèves " bien appliqués, sérieux, un doigt posé sur la couture du pantalon, l'autre sur la tranche du livre... Ecoliers zélés, assidus au discours du patron,  tout en me demandant pourquoi faut-il toujours qu'on pose des règles à toute chose... Que tu peintures, que tu fabouilles quelques rimes ou écrive l'histoire du Paon à travers les âges, faut jamais sortir des clous, du sens interdit, sinon pif ! paf ! sur les doigts...Les critiques, les censeurs, même ma soeur...  te tombent sur le rable... Moi, je suis trop fainéant pour retapisser la chambrée avec des licornes et des voyelles...  J'ai pris mes aiguilles, mon dés à coudre et ma bobine de fil... Y'a un Atelier Couture près de chez moi...
Consciencieux quand même, j'ai appelé Ferdinand qui reprisait son paletot... Lui ai demandé ce qu'il pensait du bazar... Le vieux s'est renfrogné...
- J'ai encore huit mille pages à écrire ! Alors fais pas chier...
* P. Djian
21 Centimètres.

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