jeudi 20 avril 2017

L'ADDITION ( 9 )

Regardez les chiens de guerre. Comme ils sont hargneux. Les babines retroussées sur des crocs affûtes, ils vocifèrent, gesticulent et moulinent des imprécations et des promesses qu'ils ne tiendront jamais... Ils tirent sur la chaîne, s'égosillent du gosier, s'imaginent déjà une patte dans la gamelle... Comment ils vont se gaver... Chambouler toute la cour, faire la nique aux huissiers du Château, chasser les vieilles biques de l'enclos...
Dans chaque camp, les gueux se passionnent. Banderoles et petits drapeaux, on supporte le candidat, on astique les slogans, braillant à s'en déranger les cordes vocales. On s'engueule autour des feux de bois, on mouille la liquette dans les meetings, bien convaincus de tenir l'oiseau rare, l'histrion qui va nous faire danser autrement... C'est que le Royaume est dans un triste état et que le manant a la mémoire courte... Le croquant n'hésite pas à se signer devant le Diable, pourvu que la prière soit bonne... Mais ce n'est pas tout d'allumer les feux, encore faut-il savoir les éteindre... Les braseros du passé sont là pour témoigner...
Et puis, il y a les autres... Les poutou-toutous qui frétillent de la queue. Les bouffons du bal qui ont la tête ailleurs et le nez dans les étoiles... Ils comptent les points dans cette partie de bonneteau, vous sortent des idées loufoques qui font rigoler le poulailler, amusent la galerie. Font trois petits tours et pis s'en vont... Regardez le Connétable Béarnais, avec son pif de Cyrano, ses paluches d'étrangleur et son accent de rocaille... Le genre de type qu'on aimerait avoir comme papa. Etre le fiston d'un zigoto pareil doit vous faire aimer la vie, vous envoyer tout droit dans la mêlée ( Castres ).  On imagine facile le Bon Jeannot de la Vallée d'Aspe attablé avec un autre Jeannot, Carmet celui-là, grands pourfendeurs du fromage de tête et du boudin noir, attablés autour d'un pichet de piquette, discutant des bienfaits des carrés de luzerne, de la ruralité et de la poule au pot... Les compères ont de la trogne, bavassent du temps d'avant où l'on claquait du sabot et de la menteuse en reprenant une louche de soupe aux choux...  Aucune chance de voir ces deux-là s'esbigner autour d'une tranche de lard... C''est bien dommage, ça nous aurait fait rire un peu... Ça aurait réchauffer nos arpions refroidis, nos illusions à deux balles...
Edito.
Toto.

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