Je suis un instrument à vent ( sans être grossier, c'est pas faux dit mon voisin de palier ). L'hiver, je me rétracte, et l'été, je ne sais plus où donner de la corde. A chaque nouvelle élection, c'est pareil... J'ai les ouïes qui s'embrouillent... Par bonheur, comme toute mandoline qui se respecte, j'ai plusieurs cordes à mon arc. Je peux jouer de la flute à rendre cinglé un sourd muet, et pipoter à loisir le moindre concerto en patapouf (?). D'une rengaine à deux balles, je fais une Marseillaise, et fouette cocher ! Jouez tambours, raisonnez musettes, me souffle un père noël en vert de gris... J'ai l'âme sensible d'un Stradivarius, le chevalet baladeur, et le crincrin laborieux. Mes cousins de l'orchestre - ceux qui ont du manche, et s'appliquent à jouer " juste "- soupirent quand vient mon tour de pousser le contre Ut, et le Chef en bouffe sa baguette... C'est bien fait pour le Maestro, qu'il ne vienne pas se plaindre ! On a les musicos que l'on mérite ! Il se voyait déjà en haut de l'affiche, adulé par les foules, tout au sommet de la chaîne alimentaire, à faire le gandin avec Ludwig, ou l'autre que je ne sais plus  le nom, bien décidé à nous rejouer une partoche pour cinq années, et le voilà dans la fosse, à diriger un bastringue, parce que ses ouailles ( enfin, celles qui ne vont pas à la pèche, ces jours fatidiques ) sont moitié sourdingues... Les choristes très fiers d'eux ( enfin ceux qui s'intéressent encore à la chose ) ne rêvent que de cuivres rageurs, de cymbales, et de grosses caisses qui martèlent le pas de l'oie... Ce peuple brailleur ( ou braillard ) ne rêve plus que d'ordre, et de sécurité, sous la casquette à Mimile... Finies les grandes symphonies qui promettaient des jours meilleurs, terminés les jolis adagios, les sonates au clair de lune... On se retrouve dans le parc à écouter la danse des canards jouée par la fanfare des pompiers... Je n'ai rien contre les fanfares, ni contre les pompiers, mais ça me console bigrement de jouer faux...

Bien à vous.