Ben pensait qu'il fallait conserver ses souvenirs. Les mettre en bocaux comme des haricots verts. Bien les tasser, les stériliser comme les couches bébé de jadis (en voilà un souvenir !), et les oublier au fond du placard, à l'abri de l'air, et de la lumière. Peut-être les empiler, les plier soigneusement par paires, couverts d'ambre ou de naphtaline, selon les années, les saisons... Les coller dans l'album de famille. Photos sépia, films super 8, ou diapositives des dimanches d'ennui. Visages tout neufs, sourires de ciel pur, et vélos appuyés contre le mur de la maison. Zézette en robe d'été, et l'Oncle Archibald qui s'évente avec son panama...Aujourd'hui, s'il savait faire, il créerait des dossiers, des bulles playlist You tube en carton, rangerait tout le fourbi dans le cloud, ou le métavers. Mais ben savait bien au fond de lui, ou confronté à autrui, que la meilleure solution, celle qui vous ferait dire plus tard, sur mon brin de laurier, je dormais comme un loir, c'était l'Oubli...