jeudi 31 mars 2016

HATSUNE

Il se pourrait qu'une chanson flotte dans ma tête. Une rengaine légère et tenace comme les stratus qui s'effilochent dans le bleu d'un ciel d'été, traînent au-dessus des soirées chaudes où les hommes-parasols prédisent l'orage, leurs jambes fragiles posées autour d'apéritifs indolents. Ils ont beau jeu les hommes d'ignorer les saisons à venir... Mais c'est leur façon d'être... Leurs éphémères pensées se bousculent dans l'instant. Se cognent contre les murs en mousse d'un espace qui rétrécit de jours en jours. Ainsi va leur vie de joueurs de banjo près de la voie ferrée,  au bord du précipice...
Jouée - doit-on dire chantée ? - par Hatsune Miku, cette poupée virtuelle qui envahit les écrans de la planète, hologramme virtuose pour certains, objet de fantasme pour d'autres ou simple truc en plastoc pour ceux du camp d'en face,  cette " application de synthèse vocale " tourne sans cesse sur mon manège de chevaux de bois, me signifie de sa voix de fausset et de ses prunelles en amande - si vous regardez bien, le même éclat scintille sous ses longs cils  toutes les minutes comme un rappel à l'ordre - que sachant à peine tenir sur mes dix doigts, me voilà déjà inscrit à l'inventaire d'une brocante. L'impression d'être un machin de mauvais goût... Vous savez... Ces cendriers taillés dans un faux cep de vigne , ces napperons en dentelle un peu jaunie qui dorment sous la photo des parents prise en 1960 sur la plage du Touquet.. La commode rococo et le service en porcelaine où l'Angélus de Millet s'emmerde entre deux morceaux de rôti... A l'opposé, des vidéastes aux cheveux bleus projettent sur des écrans alpha-numériques des chimères que leurs Grands Ancêtres réalisaient déjà avec des bouts de ficelle. La Joconde à moustaches ou le Chien Andalou rivalisent avec les arabesques de Hatsune. L'art ne s'invente plus. Il se malaxe avec d'autres matières. C'est tout.
Mais la question reste posée. Aurais-je un jour le charme d'une vieille cafetière...


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